J’ai lu en 2 022
Mes incontournables de l’année 2 022
Mes incontournables 2022
www.patrick-joquel.com
poésie
Titre : L’Atelier des Z’expressions
Auteur : Claire Delbard
Illustrations : Adeline Ruel
Éditeur : L’Atelier des Noyers
Année de parution : 2 019
Dans la collection Carnet d’enfance, Claire Delbard et Adeline Ruel offrent une réflexion humoristique autour des expressions de la langue française. De courts poèmes pour jouer avec Avoir la banane, En mettre sa main au feu ou encore Avoir le cœur sur la main… Une grenouille souriante les accompagne. Elle s’appelle Georgette. Une héroïne dans un recueil de poèmes, c’est assez rare pour qu’on le souligne ici. Elle saute de page en page et s’en amuse. Tout ceci est joyeux, ludique et sans prise de tête.
En lisant ce petit livre, une idée me traverse l’esprit : avec une classe mettre en voix et en scène ce petit bijou. En fond, via un vidéo projecteur, les illustrations d’Adeline et des photos ou images réalisées par les élèves ; et sur scène confier un poème à un ou deux acteurs pour leur donner corps ou voix.
On ajoutera évidemment des poèmes créés par la classe autour des expressions que Georgette a oublié.
À lire des la maternelle et jusqu’à plus soif.
https://www.atelierdesnoyers.fr/
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Titre : Mémoire vive
Photographe : Yvon Kervinio
Auteur : Jean-Claude Touzeil
Éditeur : L’Aventure Carto
Année de parution : 2 022
14€
Des photos prises il y a une quarantaine d’années en Bretagne. En argentique. Si la photographie a évolué depuis, la rivière coule toujours et les fougères continuent à pousser. Des paysages tranquilles, paisibles. On feuillette ces photos avec une fraîcheur « elfique ».
Jean-Claude Touzeil les accompagne de courts poèmes, en écho. Il mêle son imaginaire et ses émotions aux regards d’Yvon Kervinio. Son humour pétillant aussi. La rumeur du monde est présente également, comment l’ignorer ?
Cela donne un livre lumineux. Tout simplement. À offrir à Noël, pour un moment de paix (ou à une autre occasion). À offrir et à s’offrir aussi.
Colombe
Il en coulera
de l’eau
sous les ponts
avant que la colombe
ne revienne
entre deux missiles
nous apporter
son brin d’olivier
Parfois j’ai peur
qu’à son retour
on la retrouve
le bec dans l’eau
*
ronds
Il te faudra
prendre un bel élan
à partir de la berge
pour sauter franco
au milieu de la rivière
et traverser
les flaques du soleil
Aller à la rencontre
de l’enfant
que tu fus
assis sur la rive
à la pêche aux images
De l’enfant
que tu es encore
celui qui lance
des cailloux
histoire de faire
des ricochets
trois ronds
dans l’eau
*
Titre : Paradis
Auteur : Maxime Koulitz Thomas
Éditeur : Fatrasies éditions
Année de parution : 2 022
10,50€
Une première partie intitulée tourbe présente en une douzaine de petits pavés de prose un monde inédit ; rêve ou bien création en marche… On traverse avec l’auteur ce jardin pour finalement passer une porte qui pourrait bien se nommer Éden. C’est enjouée, drôle et mystérieux à la fois. Rimbaldien dans le ton et plein de surprises comme celle-ci :
…Seul un démon mesquin aurait pu vouloir leur mettre des bâtons dans les roues, ou verser un laxatif dans la bassine de sangria.
Une seconde partie vers tendre joue avec le sentiment amoureux. Un printemps enchanté, enchanteur où la personne aimée entre enfin dans la vie de l’auteur de ces poèmes. Les textes explorent les terres du désir et du manque avec force, humour et sensualité. Le lecteur se laisse emporter dans cette fougue et cet enthousiasme.
10
Christ immense
et pleine d’amour
accepte-moi
au creux de toi
qu’il me soit permis
de croire en toi
Aborder ainsi le thème de la Foi aujourd’hui en poésie est difficile, l’auteur y réussit avec une belle économie de moyens ; sans jamais tomber dans la mièvrerie mais au contraire en ouvrant des perspectives à méditer. Une Foi tournée vers l’Autre et vers les autres. L’écriture ici témoigne d’une dynamique de vie au quotidien. Cette dynamique rejoint le lecteur et l’entraîne vers un au-delà de soi-même.
Les deux dernières parties de ce recueil : la cuirasse craquée et infiniment merci présentent de courts poèmes en prose. On y navigue à vue, de l’un à l’autre, comme on traverserait un torrent de montagne en sautant d’une pierre à l’autre. En prenant le temps d’observer sur chaque caillou le paysage (visuel, sonore, tactile…).
Toujours faire chemin seul, mais laisser ce fantôme rosâtre souffler dans votre cou. Constater que cela est bon.
Vivre nu parmi les Adamistes et les grenouilles qui bondissent. S’endormir dans un fossé comme un ivrogne ou un bienheureux de l’âge d’or, gavé de contentement. Oh ! Qu’il en soit ainsi !
Un livre à lire et à relire dès seize ans et jusqu’à l’infini pour les questionnements qu’il porte, les jubilations qu’il offre et les surprises qu’il ouvre au lecteur.
https://fatrasieseditions.com/paradis/
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Titre : Le vent m’a dit bonjour
Auteur : Sylvaine Hinglais
illustrations : Barbara martinez
Éditeur : Éditions du Jasmin
Année de parution : 2 021
12,90€
22e prix Joël Sadeler
C’est le quinzième ouvrage de la collection Pays d’enfance des éditions du Jasmin. Un pays d’enfance, tout à fait. Un livre qui emportera les enfants dès la maternelle (et bien au-delà aussi longtemps qu’on demeure en ce pays) dans ses voyages. Un poème, ce sont des mots, des images, des rythmes, des surprises et ici beaucoup d’humour. Beaucoup de jubilation à jouer avec les mots. Sans prétention. Juste pour jouer. Rien n’est plus important que jouer.
Un livre à conseiller à tous les enseignants, à tous les médiateurs du livre ici ou ailleurs.
J’aime cette poésie qui s’amuse et nous amuse. Contrairement à ce que l’on pourrait croire à la première lecture, ce n’est pas aussi simple que ça en a l’air d’écrire à cette hauteur. Alors chapeau bas à l’autrice et à son illustratrice qui nous offrent ici de partager une bonne complicité avec la vie et ses rires.
https://editions-du-jasmin.com/poesie/500-le-vent-m-a-dit-bonjour.html
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Titre : La sourde oreille et autres menus trésors
Auteur : Béatrice Libert
Collages : Pierre Laroche
Éditeur : éditions Henry
Année de parution : 2 020
12€
Voilà un livre bien joyeux. Et ça fait du bien aux yeux comme au coeur. Des poèmes courts gratinés d’imaginaire et saupoudrés de quelques grains de folie. Ça pétille, ça rit, ça invente. Que ce livre ait reçu le prix Sadeler 21 ne m’étonne pas du tout. Il s’inscrit tout à fait dans une des pistes d’écriture de Joël Sadeler. J’aime ces poèmes qui s’amusent avec la langue autant qu’avec leur lecteur !
Les collages qui les accompagnent avec fantaisie et couleurs donneront des idées aux plasticiens en herbe.
Un livre à mettre dans les écoles dès la maternelle et sans limite d’âge pour autant qu’on ait gardé une part d’enfance intacte en soi.
Les pieds dans le tapis
Ça y est !
Je me suis pris
Les pieds dans le tapis
Vous me surprenez
En plein vol plané
Sans aile
Et sans boussole
C’est sûr
Je m’envole
Je n’ai plus pied
Dans mes chaussures
Direction Pôle Amour
J’emballe pour le monde
https://www.editionshenry.com
dossier pédagogique : cp-sourde-oreille.pdf (beatrice-libert.be)
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roman
Titre : Calvaire Marchepied
Auteur : Bastien Fayet
Éditeur : Calicot
Année de parution : 2 021
8€
Le ton de ce récit m’a conquis dès la première page. Quelqu’un me raconte une histoire, j’adore les histoires pas vous ? L’histoire d’un garçon décrit comme normal, sympathique, bref moyen. Calvaire (tiens, son prénom ne semble ni normal, ni sympathique, ni moyen), Calvaire a dix ans et va à l’école. Une école à deux enseignants, deux écoles en fait tant elle et lui sont différents. La maîtresse est adorée des élèves, le maître détesté ; pour les parents c’est l’inverse. Normal.
Mais poursuivons cette histoire où vient s’immiscer une belle mère qui, comme toutes les belles mères des contes, vient grignoter la vie de Calvaire. Puis arrive le chapitre trois, un mardi et la vie de Calvaire va être bouleversée à tout jamais.
Ça y est, on est plus que pris par ce petit objet : un livre. Qu’est-ce qui fait qu’un tel objet soit capable de nous emmener si loin ? La magie des mots ? Le talent de l’auteur ? Autre chose encore ou bien tout cela à la fois plus un je ne sais quoi ? Peu importe on est parti.
Viendrez-vous à bord rejoindre Calvaire Marchepied ?
Un livre à mettre dans les mains des lecteurs dès 8 ans et jusqu’à 808 ans. Et pourquoi pas à oser lire en lecture suivie en cm ou au collège pour les discussions philosophiques que cette histoire va soulever.
https://lecalicot.fr/
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Titre : L’arbre monde
Auteur : Richard Powers
Éditeur : Le Cherche Midi
Année de parution : 2 018
Je termine la lecture de ce livre et découvre dans un article du Monde qu’on estime à plusieurs milliers le nombre d’espèces d’arbres inconnues. Des arbres rares et donc fragiles. À préserver d’urgence car dans ce monde en pleine mutation climatique ils sont peut-être un avenir, peut-être aussi une pharmacopée du futur.
Ce roman donc tourne les feuilles des arbres. Via plusieurs personnages et autant d’histoires personnelles différentes. Tous se retrouvent autour des arbres, que ce soit ceux de leur jardin, ceux de leur recherches scientifiques, ceux qu’ils voient de la fenêtre ou encore ceux qu’ils essaient de sauver des bûcherons. Combats dont on a entendu parler dans nos journaux… découvertes récentes de la communication entre les arbres et cette idée qu’au-delà de chaque individu, la forêt est une entité vivante.
Entre fiction et réalité ces pages donnent au lecteur une conscience plus vive de son environnement, de sa méconnaissance et l’invite en retour à plus de curiosité, plus de respect.
Un livre étonnant. Un livre de conscience. Un livre qui propose à son lecteur de vivre un peu plus haut que d’habitude.
https://www.lisez.com/livre-de-poche/larbre-monde/9782264074430
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Titre : Le bazar du zèbre à pois
Auteur : Raphaëlle Giordano
Éditeur : PLon
Année de parution : 2 020
Voilà un roman que j’ai lu d’une traite un après-midi d’été. Le début déroute un peu : je me demandais où Raphaëlle Giordano allait m’emmener. Et puis j’y suis allé. Un bien joli bazar !
Dans ce roman vous allez trouver outre ce zèbre à pois, improbable magasin qui va déranger la ville où il s’est installé, des termes inventés comme l’audacité, un audaciel (ils seront plusieurs dans le livre, mais chacun est unique), des amateurs de rencontres silex. Des empêcheurs de rêver en liberté aussi.
Je ne dirai rien de l’histoire : ce serait gâcher la surprise.
Un livre à lire dès seize ans, et pendant les vacances, celles d’été ou les prochaines- histoire de se mettre en pause et comme on dit de prendre de bonnes résolutions pour vivre plus haut que possible.
https://www.lisez.com/?q=le+bazar+du+z%C3%A8bre+%C3%A0+pois&neuf=1&s=
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Titre : l’épaisseur du trait
Auteur : Antonin Crenn
Éditeur : Publie.net
Année de parution : 2 018
19€
Voici quelque chose de nouveau pour moi. Une écriture chuchotée. Douce et tranquille. Que j’ai suivie avec un plaisir nonchalant et une curieuse gourmandise. On est dans un quartier de Paris, avec Alexandre, un grand ado lycéen. Juste un quartier. Juste une vie et ses copains. Comme tous les quartiers de toutes les villes, il y a un plan. Tout le roman promène son lecteur entre le quartier réel et son plan. Un plan, avec ses plis, ses cases et ses orientations. Comment vivre chez soi quand la maison est traversée par un pli ?
Ça surprend. Ça amuse. Ça déroute mais comme on a un plan, on se perd pas. On suit. Beaucoup de sourires à lire ces pages.
Un livre qui nous entraîne dans l’imaginaire tout en restant ancré (encré) dans le réel d’un quartier, d’une vie. Pas besoin d’explorer le globe quand on a sous les pieds, sous les yeux des centaines d’aventures locales.
Un livre à lire dès 15 ans pour tous ceux et toutes celles qui aiment être surpris.
https://www.publie.net/2019/01/09/nouveaute-lepaisseur-du-trait-dantonin-crenn/
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Patrick Joquel
www.patrick-joquel.com